Se soigner sans piller la planète Dr Aline Mercan

éditions Terre Vivante octobre 2021

Certaines plantes médicinales sont en danger de disparition du fait d’un engouement mondial pour la phytothérapie. C’est le sujet de ce livre aussi novateur que fondamental. Aline Mercan est médecin généraliste, et phytothérapeute aussi, elle ne plaide pas pour l’arrêt de l’utilisation des plantes médicinales, mais pour plus de discernement et de modération dans leur usage. Et elle fournit de précieuses clés à cet égard.

Les plantes médicinales aussi peuvent disparaître…

Aline Mercan commence par un état des lieux exhaustif de la situation des plantes médicinales à l’échelle mondiale. L’intérêt pour les soins naturels (médicinaux ou cosmétiques) augmente à l’échelle planétaire. Le poids économique de la vente de plantes médicinal croît proportionnellement. Parallèlement, les changements climatiques font que certaines espèces se raréfient. Au lieu de les protéger, on assiste à une fuite en avant, quitte à aller jusqu’à leur extinction totale. Ceci principalement à cause des profits que cela génère pour les entreprises pharmaceutiques mais aussi parfois en raison des conditions sociales de grande pauvreté de certaines populations dont le seul revenu provient de la cueillette de médicinales.

Cheminer pour retrouver la santé

Elle poursuit par des réflexions sur ce que sont la santé et le soin avec un chapitre qui se nomme très clairement : « Retrouver les bases ». Être en santé ne consiste pas simplement à gober un (ou des) médicaments ou un équivalent sous forme de plante. C’est avant tout un mode de vie. Sommeil, activité physique quotidienne, recherche d’un équilibre émotionnel et régulation des sources de stress sont fondamentaux. Ainsi que l’attention portée à la qualité et la quantité des aliments que l’on ingère. Le jeûne (intermittent ou plus long) peut faire partie de ces pratiques si avis favorable de son médecin traitant. Chaque personne peut avancer à son rythme sur ce chemin qui doit forcément être individualisé, mais l’attention portée à notre mode de vie au quotidien est un incontournable. C’est pour accompagner ou optimiser la mise en équilibre de ces fondamentaux que l’on introduira le soin par les plantes et non pour y pallier.

Du bon usage des plantes médicinales

Aline Mercan fournit ensuite de nombreux repères pour une utilisation écoresponsable des plantes médicinales. Elle propose de privilégier les filières courtes et éthiques (car de nombreuses plantes médicinales, y compris des classiques, sont importées parfois d’aussi loin que la Chine ou l’Inde). Pour cela, il faut connaître certains labels nationaux et internationaux qu’elle présente. Et se tourner vers des organisations professionnelles comme le syndicat des SIMPLES en France ou encore l’AFC (Association française des professionnels de la cueillette sauvage).

L’aromathérapie sans complexe

Elle interroge également l’utilisation décomplexée des huiles essentielles qui nécessitent d’énormes quantités de plantes pour leur production. On néglige complètement le fait que d’autres formes galéniques des mêmes plantes fonctionnent aussi bien tout en utilisant nettement moins de quantité.

Le pillage des pharmacopées traditionnelles

Elle revient enfin sur l’engouement que suscitent certains soins traditionnels. Médecine traditionnelle chinoise, ayurvédique, africaine ou encore tibétaine étaient circonscrites à des contextes géographiques précis. Leur pharmacopée s’exporte maintenant largement, ce qui contribue au pillage des ressources.

Se soigner par les plantes

La partie analytique de ce livre est puissante et richement documentée. Et pourtant, c’est à peine la moitié du livre. L’autre moitié est la partie pratico-pratique dans laquelle le Dr Mercan fait le tour des pathologies les plus répandues des grands systèmes du corps (par exemple en gastro-entérologie : propositions de plantes du foie en cas de stéatose, de calculs biliaires, d’hépatites ou encore les plantes de l’estomac si reflux, gastrite, ulcère etc). Cette partie est précieuse et, à mon sens, un tour de force de clarté et d’esprit de synthèse. Elle propose de nombreuses pistes à de nombreux troubles de santé. Les plantes présentées sont classées avec un code couleur : les plantes en verts peuvent être utilisées sans soucis car la ressource est abondante. Les plantes en orange sont à utiliser avec précautions. Et celles en rouge sont à ne plus utiliser du tout car en danger.

Changer de pratiques

 

Ce livre est bien un manuel dans le sens où il transmet un savoir sur l’usage des plantes médicinales. Mais il amène également de nombreuses pistes de réflexions dont certaines doivent déboucher rapidement sur des changements de pratiques. Et il nous accompagne dans la mise en œuvre de ces changements. Un immense merci à Aline Mercan et aux éditions Terre Vivante pour ce livre au style modeste et au contenu précieux.